Comme beaucoup de villes en Europe, Lausanne propose en été un riche éventail de manifestations culturelles en plein air dans le cadre d’un programme intitulé «Lausanne estivale», qui se déroule du 14 juin au 15 septembre et qui en est à sa 37ème édition (pour le programme de cette année, cliquez ici). L’une des manifestations phares de la saison estivale lausannoise est le «Festival de la Cité».
Datant de 1972, ce festival est donc antérieur à «Lausanne estivale» ; il se propose, dans le cadre intimiste des vieilles ruelles de la Cité (ou dans son voisinage immédiat), «6 soirs d’effervescence culturelle décloisonnée» (pour reprendre la belle formule officielle) au travers de plus de huitante spectacles qui regroupent des formes d’expression artistique aussi variées que du théâtre, de la danse, de la musique classique, contemporaine et populaire, du mime, du spectacle de rue (y compris pour les enfants), des récitals littéraires, des arts visuels/plastiques ainsi que des manifestations de type transdisciplinaire.
Malgré un budget d’environ 2,3 millions de francs, le Festival est gratuit, étant financé «pour un tiers par des subventions publiques, un tiers par des sponsors et un tiers par les recettes des boissons et de la nourriture» (source: ATS). Curieusement, cette année, la vente de badges de soutien n’était plus être de mise (il y avait bien un journal quotidien en vente mais uniquement par souci écologique) – j’ai donc payé une partie de mon écot en boissons.
Je dois avouer qu’avant de m’être établi à Lausanne il y a près de 12 ans je n’avais jamais assisté à une soirée du Festival de la Cité. Etait-ce dû à un chauvinisme culturel (j’ai habité Genève jusqu’en 2001) ou à un manque d’intérêt pour les manifestations culturelles en plein air ? La raison est plus simple : n’étant pas titulaire à cette époque d’un abonnement général des CFF, je rechignais à me déplacer pour «consommer de la culture» (à l’exception de certaines rétrospectives de peintres ou de photographes ainsi que des manifestations de type biennale).
Une fois installé à Lausanne, je pris vite goût au Festival, de sorte que même lorsque je travaillais à Zurich en 2007 et 2008, j’ai préféré faire les allers et retours en semaine afin d’être en mesure d’assister à un maximum de soirées … Même si je regrette très fortement certains changements (par exemple, le transfert de la danse contemporaine du lieu-dit «Pré des Druides» vers des sites plus petits : les arches du Pont Bessière et la rue de l’Académie), le Festival de la Cité est l’un des événements incontournables à Lausanne à mon sens.
Néanmoins, cette année aussi, c’est au dernier moment que je me suis décidé à aller goûter au Festival en raison d’un emploi du temps chargé, d’un séjour en France et du cumul de fatigue en résultant, lequel a fini par me faire préférer un samedi soir pantouflard à un papillonnage culturel à travers les rues de la vieille ville de Lausanne : honte à moi !
Emballé l’an passé par le spectacle de mime du duo japonais Sivouplait et le concert donné à l’aide de légumes par le Vegetable Orchestra, j’étais curieux de voir quelles surprises la dernière soirée de la quarante-deuxième édition réserverait au spectateur-papillon intéressé dans les arts vivants.
En particulier, je comptais assister à la représentation d’une chanteuse-artiste japonaise, Baguette Bardot (de son vrai nom Takarako Atami mais aussi connue sous ses alias de Toastie ou aussi Toast Girl), «Enquête magnétique» de la Compagnie Pied de Biche et «Hit me hard» de la Compagnie Nuna.
Mon premier rendez-vous avec le Festival fut la performance de Toastie, la chanteuse japonaise dont les mains de son personnage Baguette Bardot se terminent par des baguettes de pain ! Un mélange de musique pop japonaise et de danse dans le style de la variété française des années soixante et septante que j’ai trouvé presque déroutant mais néanmoins captivant et même enrichissant en termes de découverte de nouveaux horizons culturels. En plus, le tout sur ma scène préférée : le très intimiste «Cabaret Saint-Maur».
Avant le spectacle suivant qui m’intéressait, j’en profitai pour écouter quelques minutes du groupe québécois Marie-Pierre Arthur, qui me semblait être un mélange de rock et de country à l’américaine. Dommage que j’avais décidé de donner priorité à la danse contemporaire.
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Je me rendis donc à la rue de l’Académie en passant par la rue Cité-Derrière. Arrivé plus ou moins devant la ruelle du Lapin-Vert, où deux scènes avec deux batteries attendaient les spectateurs, disposées face à face. Intitulée «Hit me hard, dialogue rock entre batteurs et battle chorégraphique au féminin», la création de la chorégraphe lausannoise d’origine coréenne YoungSoon Cho Jaquet ne me déçut vraiment pas grâce aux performances des deux danseuses et des deux batteurs, qui se donnèrent la réplique lors d’une espèce de duel endiablé. Quel dommage que je n’osai me déplacer pour prendre des photos depuis de meilleurs angles car les deux danseuses (ainsi que les deux batteurs) s’investirent totalement dans ce spectacle de danse et de batterie à percussion qui dura plus de trente minutes presque non-stop !
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Un crochet par la cour du Gymnase de la Cité afin d’y humer l’ambiance et je me trouvai face à face avec les constructions monumentales en carton du plasticien français Olivier Grossetête. Ephémères monuments à la gloire de l’effort collaboratif: «En élevant une tour de Babel sans problèmes de communication, sans grues et sans échafaudage, les participants confrontent leurs savoir-faire et leur savoir-être et construisent une métaphore du bien vivre ensemble en même temps que l’objet». Dommage que je ne remarquai pas qu’une «destruction collective» était programmée pour 23h30.
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Après avoir quitté «La Cour» puis traversé la place du Synode, j’aperçus une personne qui prenait pas mal de temps à photographier la rue Cité-Devant ; par mimétisme, je fis de même mais c’est seulement en préparant les photos pour cette page que je compris pourquoi (quel est donc cet engin suspendu ?). De là, je partis écouter la fin du concert du groupe québécois Marie-Pierre Arthur. Puis, je fis le tour du parvis de la cathédrale à la recherche du spectacle «Enquête magnétique» de la Compagnie Pied de Biche et, ayant pris la mauvaise direction, je me finis par me retrouver à la Place du Château.
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Et là, jackpot, j’eu droit à un concert de musique rock expérimental, Psychopharmaka, avec la Compagnie Rodolphe Burger et Anna Aaron. Selon le descriptif officiel, «psychopharmaka, réalisé en compagnie de l’écrivain et traducteur Olivier Cadiot, offre une plongée au cœur de la langue allemande et de sa diversité.»
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Je ne connaissais pas le musicien français Rodolphe Burger, ni la chanteuse bâloise Anna Aaron. Ce fut donc pour moi une découverte, dans le plus pur esprit du Festival et je peux vous confier que j’ai vraiment apprécié !
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Avec l’idée de prendre le métro M2 à la place de la Riponne pour rentrer à la maison, je descendis la rue de la Cité-Devant à temps pour assister à un spectacle bien insolite, lequel attira l’attention de Toastie en déambulation à travers la Cité (en pantalons multicolores sur cette photo et celle dessous), qui s’empressa d’immortaliser l’événement à l’aide de son appareil photo :
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le treuillage d’un pianiste et de son instrument !
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Au risque d’attraper un torticolis, j’écoutai presque l’intégralité du récital de piano du Suisse Alain Roche intitulé «It’s time», ma tête renversée en arrière afin de prendre des photos et enregistrer une partie du concert. Quel spectacle surprenant que d’écouter un pianiste aérien dans une ruelle médiévale de Lausanne un soir d’été après minuit …
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Puis ce fut la redescente du pianiste et de son instrument par le «staff» — j’en profite pour accorder mes remerciements à tous les volontaires et autres personnes faisant partie de l’équipe du Festival (360!) qui oeuvrent dans l’anonymat mais sans qui cette magnifique série de manifestations culturelles ne pourrait pas avoir lieu … En bref, ce fut une soirée mémorable … même s’il fallut ensuite une marche de plus de 35 minutes (écologie oblige) pour rejoindre mon domicile.
PS D’après le site officiel du Festival de la Cité, le Festival a attiré 113’000 spectatrices et spectateurs pour cette quarante-deuxième édition. Même si la Cité est un peu exiguë et ne se prêterait pas à l’afflux de centaines de milliers de personnes, il mériterait plus de visiteurs, non ?
PPS Un gros regret : celui d’avoir loupé «In Sturm und Eis», la mise en musique ainsi que la projection dans la cathédrale du premier film de montagne tourné à plus de 4’000 mètres d’altitude. L’an prochain, je lirai le programme plus attentivement, promis !
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